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19 juin 2009 5 19 /06 /juin /2009 06:54

De la Vie et la Mort comme circularité signifiante en anthropologie négro-africaine

(Point de vue tiré de la culture tetela (*)

Jean-Pierre Luhata

Cette question des soins appropriés à apporter à une personne défunte, suppose aller à la racine de la conception du phénomène de la mort dans notre culture. Mais envisager de comprendre la mort procède par l'attention autour d'un autre aspect de celle-ci qui est la vie. Pour sa meilleure saisie et de ses incidents précurseurs, il convient de faire un saut dans la manière dont le Tetela reçoivent la vie dès le début jusqu'à la phase de la mort voire au-delà de celle-ci. Cette réaction se veut spontanée qu'elle ne prétendrait couvrir tous les aspects de la thématique, dans mon petit effort de compréhension.Les rites autour de premiers signes de la présence de la vie se situent sur deux principaux aspects:

1. De la transcendance de la MortLa mort est un mystère qui ne cesse de fasciner, elle demeure dans sa nature une absurdité à laquelle se plie le destin de l'homme sans totalement la comprendre.Pour essayer d'en atténuer la témérité, l'on tente de lui donner une signification, au terme d'une relative familiarité au travers les chants funéraires et différentes étapes qui entourent ce moment tragique. D'où nos genres littéraires et langage artistique ne cessent de souligner le fait de sa transcendance ou l'aînesse de la mort sur les réalités de la vie, dans le monde des vivants. La métaphore tetela soutenant que:"De nous tous, seule la Mort reste notre aînée commune",indique une double signification; d'une part, nul n'est supposé se soustraire à ses imprévisibles décrets.Le destin humain lui est soumis, un rendez-vous au quel tout un chacun devrait répondre sans exception.Le soleil n'oublie personne,disent les Tetela(Onya hohee onto!), pour mettre en relief son caractère universel au point de détromper l'illusion de ne pas en être concerné. Quand on tente d'en ignorer l'imminente corrélation de sa liaison avec la vie(au terme de la vie), les Tetela métaphorisent tel voeu délibéré de l'ignorer comme reflet de manque de sagesse:"seul un insensé(moins raisonnable)simile d'ignorer l'inévitable éventualité de la mort dont le destin est co-extensible à la vie. De la métaphore: ("Onto hadimbiya nyoi kete djele!)". La mort étant cette réalité dont nul ne saurait en faire abstration en raison de son imprévisible promptitude à frapper à toute porte, même ou on si attendait les moindre.

 2. L'interférence communautaire des Vivants/Morts

En raison de la transcendance de la mort sur la vie, les humains ne cessent de nourrir une crainte qu'elle inspire à l'idée de tenter de saboter les funérailles d'une personne disparue..Dans l'imaginaire collectif tetela, on accompagne les différentes étapes de la vie de la même manière qu'on la reçoit dès les premiers instants du constat dans le sein d'une potentielle mère. Personne ne pourrait prendre plaisir à se passer de l'observance de rituels de la mort dès lors qu'elle éveille à la conscience des composantes qui accompagnent le fait exister en vue aussi d'éviter de subir,en retour,les revers consécutifs au manque de cette même observance. Celle-ci s'exprime par le respect que doit se faire entourer ce moment relèvant de cette transcendante perception de la mort sur les vivants.Tout le monde se met debout quand on passe avec un mort en guise de ce respect. Sans aucune superstition, la violation de certaines pratiques funéraires entraine des conséquences souvent tragiques parmi les êtres vivants. L'hypothèse la moins probable, mais qui coïncide avec la destinée chrétienne est que la vie vient après la vie et l'on ne pourrait faire passer un être cher de ce monde, à l'autre dans une insalubrité comme s'il n'était aimé de personne. Quelle que soit la méchanceté de la victime, son corps devrait faire l'objet d'un entretien mérité avant de l'ensevelir de manière à accompagner son destin final en toute dignité. Même dans le cas d'un décès par suicide, la société lache les héros qui viennent danser autour d'un corps froid avec des longs sabres menaçant de dépecer son corps pour exprimer le mécontentement sociétal vis-à-vis de l'egoïsme d'une telle personne ayant ainsi trahi la destinée communautaire de sa vie,allant jusqu'à son sacrifice suprême par la mort.Imbue par tel enfermement,elle se soustrait ainsi à l'affection communautaire.. Ce rituel tentera de lui rendre la part posthume de sa dignité trahie parce qu'obnubilée dans ses particulières inquiétudes sans les partager. Pour la société tetela traditionnelle, la vie est prise en charge en tout moment par ses membres adultes, de sorte qu'on ne saurait penser des problèmes que la société ne sache régler. Cette vocation communautaire rappele une autre métaphore qui souligne à propos de l'enfant, qu'il n'appartient à sa mère que du moment ou il se trouve encore au sein de celle-ci. Ce qui n'est nullement à confondre avec une forme du communisme, mais il s'agit de mettre l'accent sur la dimension publique de la vie par laquelle l'enfant devra participer de cette autre valence, par-delà le restriction du cadre familial. Le cas du suicide, mentionné à peine,soumet ainsi la famile de la victime aux obligations d'affranchir la dignité de leur membre défunt,auto-bafouée par la mort,en payant une caution réhabilitatrice évaluable en argent et animaux domestiques en vue de réparer la découragente décision à laquelle remonte cet agir mortel l'avant rabaissé au rang animalesque(liane au coup).Seul tel rituel pourrait rendre dignité au corps froid que l'on interdit de pleurer jusqu'à sa totale affranchisation de cette servitude délibérée.Peut-être il faut assister à un cas d'une grave méchanceté pour qu la société délibéré les éventuels cas de pendaison. Quoi que de Heusch l'affirme dans ses notes l'existence de certaines parties tetela(Omuna), il faut s'attendre à des cas de rares particularité. Il semble selon certaines opinions qu'on refuse les droits funéraires aux pendus, voire leur enterrement.Malgré que cette ethnie ne se complaise à livrer des scènes publiques et macabre pour légitimer une peine capitale.

Bref,en vertu de la transcendance de la mort(mystère insoluble)et de l'interraction de la vie avec la mort, surtout aussi de la crainte que ce phénomène inspire à l'homme croyant au destin unitaire avec le monde des vivants que l'on s'interdit d'intérrer les morts insalubres. La mort autrefois phénomène rare, s'est plus développée avec l'ouverture des routes aux temps coloniaux, ce qui en aura favorisé ainsi la prolifération rapide par la transmission des bactéries. Que dire des guerres dites de civilisation qui tendent à désacraliser la vie,ainsi bannalisée par une fureur déchaînant de la mort ? L'interaction Vie et Mort dans l'acception communautaire interdit d'ensevelir les morts sans les laver. Dans le passé,le mot Cendo(plate-forme sur laquelle on séchait les morts avant leur définitif ensevelissement)attestait à ce moment-là,la rareté de la mort ainsi que l'ignorance de nouvelles techniques crématoires.Cendo tout court devenu sommement,dans le langage funéraire, symbolique de la commisération au moyen du tambour(Lokombe),évoque à l'origine la plate-forme aménagée pour sécher les corps de défunts.Cette pratique devra être saisie comme particulière modalité de traiter les morts avant leur défintif enterrement en milieu et moment ou les techniques actuelles restent encore ignorées.En somme,ces soins funéraires sont une manière de nous familiariser à la mort, de lui prêter sens, de la dédrammatiser,de la rendre moins absurde...que de l'inscrire dans le champs de notre exister ouvert à l'infini.. La mort est un autre point de la circulatité existentielle surplombant les limites qu'impose la finitude(temps, lieu). Elle transcende la vie...

Jean-Pierre Luhata

26.09.08Certains détails me sont fournis des recherches du séminariste d'alors, qui sera l'actuel PrJ.A.Nyeme Tese, "La Mort chez les Tetela", Luluabourg, Sercas, 1969.

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